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On Line Library of the Church of Greece


T. R. Archipretre E. Kovalevsky

Le mystère de la Mère de Dieu

Institut de Theologie Orthodoxe Saint-Denys

 

CINQUIEME  LEÇON    

Sans père  

Le premier homme, selon la Bible -je le répète- n'a pas de père terrestre; la nature est sa mère et le Créateur son Père céleste, non certes selon la nature divine, mais selon la volonté divine; de même, le Deusième Adam n' a point de père terrestre.  

Adam n'est pas que l'homme premier-sculpté; nous lisons dans la Genèse, aux deuxième chapitre, qu'il est aussi le prototype de l'univers (consulter les Cours  sur  la  Genèse).  Cet univers, dira  l'apôtre Paul, est l'image de cet homme pré-éternel. (pré compris au sens de avant la formation du monde et nοn au-delà du temps dans le sens divin), lui-même à l'Image de Dieu. Adam  n'est  pas qu'un individu parmi les autres, il est pan-homme, homme "collectif", il concentre en lui l'humanité totale. Nous pouvons donc en conclure que l'humanité dans sοn origine, dans sa totalité est sans père terrestre. Ainsi, je suis né sans père comme homme, et né d'un père comme un des hommes.  

Semblablemen,  le  Christ  sera un individu "sous Ponce Pilate" un prédicateur venu de Galilée, ne à Bethléem, Jésusde Nazareth,et, simultanément,  l'homme  total  Fils  de  l'homme. Paul précise: nοus sommes tous morts en Adam, tous ressuscités en Christ. Aurait-il pu annoncer cette vérité si Adam et le Christ n'avaient été que  des individus.  

Saint Jean écrit dans  son Prologue: "le Verbe  fut chair",  c'est-à-dire matière,  corps,  humanité;  créature au sens  objectif,  universel, et il. ajoute:  "Il a habité parmi  nous'', c'est-st-à-dire en tant qu'individu, que  "Jésus  de Nazareth". Jésus de Nazareth est le Pan-Anthropos. Le Deuxième Adam se devait d'être conforme au premier, voire: homme sans père terrestre,  mais ayant une mère,  c'est-à-dire  la matière. Les rapports  entre mère  et  fils précèdent dans  la  création  ceux du couple.    

 

Prè-chute d'Adam  

L'idée de la  séparation d'Adam en homme et femme est postérieure à la création du premier  homme sans père ni  épouse. Le "dédoublement" d'Adam ne doit  pas être  considéré  comme un  achévement, le dernier trait de la perfection de la créature, mais plutôt comme un prélude à la chute. En quoi? Dieu propose à Adam -je l'ai souvent indiqué dans mes cours - de  trouvér son complément  dans le monde inférieur à lui: la bête,  la nature...  afin d'humaniser le  cosmos.  L'homme  préfère nommer les bêtes  et posséder un complément  qui  lui  soit  égal.  

C'est déjà l'avan-chute, un refus du plan divin qui prévoyait le mariage du supérieur avec l'inférieur dans le but d'élever celui-ci vers celui-là. Le mariage vοulu du Créateur n'est pas celui d'Adam et Eve -le Propre de la messe de mariage y fait allusion-, mais les épousailles de Dieu et de Sa créature, Christ et l'Eglise, l'esprit et la matière, Adam et la nature, pour que l'inférieur rejoigne en égalité le supérieur. Adam décline la proposition divine; distinguez-vous ici l'analogie subtile avec la chute du diable?   

 

"arrière, Satan !"

Satanaël, lui aussi, a refusè cette pensée divine; la chute orgueilleuse du plus grand des Séraphins résidait dans le refus de l'humiliation de Dieu et nοn seulement dans son désir d'être comme Dieu. Le Christ,  en l'évangile de s.Matthieu, lance à Pierre:   "Arrière, Satan!". D'où vient cette étrange dureté du Seigneur à l'égard de ce-lui auquel Il dit, quelques lignes plus haut: "Bienheureux es-tu, Simon, fils de Jonas ... tu es Pierre ..." ? Parce que Pierre ayant reçu. du Père céleste la révélation de la divinité du Christ, ébloui par elle, repousse l'humiliation du Fils de Dieu vivant, reflétant la tentation primordiale de Satanaël. Dieu se dépouille,  descend en la matière, vers Sa créature pour la faire monter à Sa droite. La mêne économie  se posait à Adam, face au cosmos.
   

 

la nature,  épouse de l'homme. 

La destinée de l'homme  est  d' épouser le cosmos et de le placer au niveau humain.  Les contes de fées exhalent une certaine nostalgie de ce que l'hοmme ne sut pas accomplir... les bêtes parlent et, dans les récits plus antiques,  les plantes chantent  ... les bêtes s'humanisent, les fleursr s'animisent (anima âme). Souvenez-vous des paroles prophétique que nous lisons à la fête de la Théophanie: les montagnes bondiront cοmme un troupeau de béliers et les arbres applaudiront au  pectacle merveilleux de la Venue du Christ; l'élément inanimé οu de peu de mouvement entrera en mouvement et dansera. Le monde ne sera pas que le paradis des esprits, en lui la nature acquerra progressivement les qualités supérieures; nous verrons alors la matière brute: cette lampe qui m'éclaire,  se promener, les machines "s'évangéliser"...
   

 

dédoublement de l'ego

Revenons à Adam. Il refuse ses noces avec le monde inférieur. Dieu condescend à cette première restriction de son âme. Ce n'est pas une désobéissance, ce n'est pas encore le péché, le choix du mal, c'est le choix du bien facile, une défaillance, dirons-nous. Il aspire à un amour,  propre à lui. Alors,  Dieu l'ensommeille:  premier sommeil,  première inconscience. Et qu'arrive-t-il? La femme sort du côté de l'homme. Et Adam, que dit-il? Quelles sont ses premières paroles? Guère sublimes, dignes plutôt de la bouche d'un Monsieur Dupont, et si loin du Christ, de la révélation divine! Il s'écrie: "Os de mes os, chair de ma  chai". En réalité,  qu' est-il advenu? Adam a un couplément, Adam est deux -c'est magnifique! Mais ce cοmplément, de quoi est-il fait? Ce  cοmpléuent est l'élargissement de  son "moi" Adam  ne sort pas de lui-même, car Eve est  sortie d'Adam.
             

L'amour vrai est, précisément, sortir de soi-même, aller vers quelque chose de totalement autre. Lorsque Dieu commença à créer notre cosmos, Il ne le créa pas sublime, mais le tira du néant: autre, différent. De là, cet amour de Dieu pour ce monde informe qu'il forme! Tandis qu'Eve est le prolongement de l'homme. Double aspect du couple masculin et féminin:  d'une part,  complément,  d'autre part, élargissement de l'ego. Est-ce, peut-être, pour cette raison que les amoureux sont généralement égoistes.    

 

rachat par la mort

La terre a produit Adam. Nous pénétrons dans un autre rythme,  ce-lui de la grâce de Dieu, du souffle de Dieu, de l'amour de Dieu, et cette chose vile, la terre, se transforme peu à peu en plantes, en bêtes pour s' achever en forme d'homme. La pensée divine la soulève. Et voici, la nοn-reconnaissance, l'ingratitude presque d'Adam. Loin de se plonger en ce rythme,  il réclame:  je veux une compagne  os de mes  os. N'est-il-point lui-même tiré du limon. Dieu le lui rappelle:  Attention! tu as refusé d'élever jusqu'à toi la nature, et, après le péché  Il ajoute: "Τu es poussière et tu retourneras en poussière". La mort de l'homme est une sorte de rachat, il redevient ce qu'il aurait dû exalter. Le Tout-Puissant ne lui a pas imposé l'amour de  l'inférieur. Il le lui a proposé.

 

mère et fils    

Les rapports entre mére et fils, au sens élevé, sont plus soudés, plus étrangers à toute impureté que ceux des épοux. Οn a vu des criminels adopter soudain envers leur mère une attitude de pureté absolue. Il serait intéressant d'en relever les exemples dans l'histoire et la littérature. C'est pourquoi l'Homme,  puis le Fils de l'Homme, ne pοuvaient naître d'un couple; d'un "moi" élargi. Le Christ devait naître de quelque  chose d'autre: cosmique,  universel, issu de la Maternité, la Femme,  afin d' être pleinement homme,  sans déficiences; autrement, Il eût été homme avec le péché οu,  du moins; l'avant-goût du péché,  le manque du vrai amour;  fruit de  cette union demi-égoiste.  

J'e ne veux nullement diminuer la valeur du mariage!  

"Le mystère est grand par rapport au Christ et à l'Eglise". Il est l'image sacrée de l'amour de Dieu pour Sa créature, le symbole vivant de l'économie de notre salut, mais il nous faut reconnaître la justice divine.  

En effet,  si la sentence de la mort après le péché  (retour à la terre)  contraint la  race adamique  à redevenir  ce qu' elle ne voulut pas être, semblable à celle qui aurait dû être sa bien-aimée, les rapports entre homme et femme,  par la même  sentence divine, se transforment en rapports inégaux: l'hοmme domine la femme,  la protège, et la femme soumise à l'homme  "hypostatise" le cosmos ... épouse-esclave, elle demeure cependant reine dans la maternité. Ainsi Dieu a eu le dernier mot.  Ceci nous donne à. réfléchir,  est-ce la peine de  désobéir à Sa vοlonté...    

 

trois naissances humaines  

Je dois vous faire remarquer que le commandement: Multipliez-vous et remplissez la terre, n'est pas adressé au couple, dans le premier chapitre de la Genèse, mais à l'Humain, c'est-à-dire à l'androgyne. C'était donc un tout autre commandement, une tout autre forme de naissance que celle qui survint ensuite. ll est trois formes de naissance: naissance pré-chute, naissance après la chute, naissance mariale -je ne puis, aujourd'hui, m'arrêter sur ce sujet, je l'indique simplement.    

 

la boule aux multitudes de fenêtres

Le couple, en plus du "moi prolongé", renferme un élément plus grave dont je n'ai pas parlé: la rupture avec le passé. Adam dit: "L'homme quittera son père et sa mère  et s'attachera à sa femme, et ils deviendront une seule chair" Une nouvelle entité s'impose, si forte -deux amoureux, nouvelle famille- qu'il lui faut couper avec
le passé pour être elle-même. Le Christ, Lui, récapitule tout le passé.
Le couple -l'hérédité exclue- la nouvelle génération est étrangère à l'ancienne génération. L'unité du couple est animée d'une telle puissance que lorsque Eve se prostitue avec les paroles de Satan, Adam ne divorce pas, ne la répudie pas, ne proteste même pas, il la suit. Mais, me demanderez-vous, avec qui Adam a-t-il rompu ? Avec Dieu et Son commandement,  au nom de l'entité nouvelle du couple,  d'une monade formée à deux.  

Le Christ aurait-il pu Se manifester au sein d'une monade, Lui qui résume l' humanité?  

Imaginez le couple sous l'image d'une boule munie d'une fenêtre minuscule d'hospitalité -une fenêtre, nοn une porte- et le Christ comme le Maître d'une boule  couverte de multitudes de  fenêtres pareilles à des portes largenent ouvertes, sans entrave pour y pénétrer. Je suis la porte. Si quelqu'un entre par Moi il sera sauvé; il entrera et il sortira et trouvera des pâturages".    

 

Trois éons  

J'insiste. Il existe deux sortes d'épousailles: le mariage proposé par Dieu à Adam, le supérieur uni a l'inférieur afin de le monter à lui, et celui réclamé par Adam au Créateur, le semblable élargi dans le semblable, le couple. Après le Deuxième Avènement et la transfiguration du cosmos, arrivera une troisième période: nous vivrons sous l'aspect de fille.Le monde deviendra fille de Dieu. Notion encore voi- lée que je ne veux pas effleurer.  

Trois éons mystérieux: le nôtre, celui de la maternité (mère-nature, mère-Marie, mère-Eglise); le Deuxième Avènement, les noces du Christ avec sa créature (éon de l'Epoux); l'éon futur, l'éon de la fille de Dieu".  

Revenons aux termes masculins. La paternité, c'est Dieu; l'époux, le rapport de Dieu avec le monde; le fils la réalisation divino-humaine; enfin, le terme féminin: l'épouse, le rapport du monde avec Dieu.  

Pourquoi les Ecritures et l'Eglise appliquent à Dieu des noms masculins, Père, Fils, à Celui qui est au-delà des sexes? Que Dieu soit "invisible", nous le comprenons, mais pourqoi Père éternel, Fils éternel et non fille éternelle, mère éternelle? De plus l'Eglise s'est toujours opposée aux tendances "féminines", dans la Trinité par exemple. Notre Dieu serait-Il masculin? Certes non, puisque notre esprit déjà est asexué et que les anges ne sont ni hommes, ni femmes.  

J'aborderai cette question la prochaine fois.    

 

Le mystère de la Mère de Dieu

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