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Jean Meyendorff

L'origine de la controverse palamite: la première lettre de Palamas à Akindynos

Théologia ΚΕ, Athènes 1954, p.603-613.


Chapitre 1

Nous avons eu récemment l'occasion de publier dans «Θεολογία» (Tome 24, 1953, pp. 557 - 582) la troisième lettre que le grand théologien byzantin du XlVe siècle, St Grégoire Palamas, plus tard archevêque de Théssalonique, a adressé à son futur adversaire Akindynos à quelques mois du concile de 1341, où les deux thèses s'affronteront officiellement et qui verra la première victoire du Palamisme. Aujourd'hui nous revenons quelques années en arrière, vers un texte lui - aussi inédit qui nous place aux origines premières de la controverse.

Nous avons donné ailleurs (1) un bref historique des circonstances dans lesquelles la controverse a vu le jour, avec une analyse des documents qui s'y rapportent. En 1333 ou 1334, des légats romains, deux dominicains, François de Camerino, évêque de Cherson, et Richard, évêque du Bosphore, viennent à Constantinople entamer des pourparlers d'union avec l'empereur Andronic III Paléologue. Barlaam le Calabrais, officiellement chargé de parler au nom de l'Eglise grecque, rédigea un assez grand nombre d'ouvrages de polémique antilatine. A l’exception d'un seul, ils sont tous inédits (2). Six d'entre eux forment un traité à part et constituent le prétexte de la présente lettre de Palamas (3).

Le théologien hésychaste rédigea en même temps deux «Λόγοι ἀποδεικτικοί, ὅτι οὐχί καί ἐκ τοῦ Υἱοῦ, ἀλλ' ἐκ μόνου τοῦ Πατρός ἐκπορεύεται τό Πνεῦμα τό ἄγιον» (4) que qui fût adopté par l'Eglise occidentale dans son ensemble. La théologie byzantine, au contraire, n'est jamais sortie du cadre trinitaire élaboré par les Pères Cappadociens. Son conservatisme rigide ne lui a généralement pas permis de concevoir une réponse bien constructive à la théologie latine, mais son opposition au «Filioque» fut néanmoins très nette.

Le raisonnement latin affirme à son point de départ que seule une relation d'origine peut constituer une distinction entre les Hypostases divines. Il en résulte que c'est bien d'une relation d'origine qu'il s'agit lorsqu'on distingue l'Esprit et le Fils. Cette conception, latente chez St Augustin, exprimée plus parfaitement par Anselme de Cantorbéry et développée dans le Thomisme, fut considérée par les Grecs comme une renaissance du Sabellianisme: les Personnes divines, en effet, y perdaient leur existence propre au profit d'une essence divine, au sein de laquelle les «oppositiones relationis» seules constituaient les distinctions entre les Hypostases. On connaît la formule anselmienne : «Nec unitas admittat aliquando suam consequentiam, ubi non obviât aliqua relationis oppositio» (5).

L'examen le plus rapide des traités antilatins de Barlaam nous fait aboutir à cette première constatation : le_Calabrais n’était en aucune mesure un représentant de la scholastique occidentale, comme l’on pensé certains auteurs (6). Nous le voyons au contraire défendre le point de~vnîe™ orthodoxe' JtiadTfionriei. Ses oeuvres furent extrêmement populaires à Byzance et reçurent une très large diffusion : nous , les trouvons en effet dans un très grand nombre de manuscrits d'origines très diverses. Il a entre autres grandement inspiré Nil Cabasi-las, dans sa grande oeuvre contre la doctrine latine delà Procession, la plus importante qu'ait vu le Moyen - Age byzantin. Ce dernier répète
parfois mot pour mot les arguments, les citations de Barlaam (7). L'ouvrage de Nil, d'autre part, a servi de source principale à l'argumentation des Grecs au concile de Florence (8), ce qui n'est peut-être pas étranger au fait que le parti «humaniste» delà délégation ait finalement cédé aux conclusions latines, rejetées par le palamite Marc d'Ephèse.

Dans sa théologie de la procession, Barlaam déclare souvent suivre la doctrine des Pères qu'il assimile à une révélation divine indémontrable (9). "Ὣσπερ κανόσι, écrit - il dans le traité qui justement fait l'objet des critiques de Palamas, καἰ ὁμολογουμέναις ἀρχαῖς χρῆσθαι αὐτοῖς πρὸς τὴν τῶν ἐκάστοτε ζητουμένων δογμάτων εὓρεσιν, ὅσα δὲ οὔκ εἰσιν ἐπί ρητοῖς ἐν τοῖς λογίοις ἀποφανθέντα, οὐδ' ἄλλως ἐστί γνώριμα ἐπαναφέροντας αὐτὰ ἐπὶ τὰ ἤδη ὁμολογούμενα σκοπεῖν χρὴ, εἰ ἐκείνοις ὁμοφωνεῖ, καί τὰ μὲν συνάδοντα ἐγκριτέον, τὰ δὲ μὲ τοιαῦτα ἀποκριτέον (10). Ἑκάστη τῶν ἀποφάνσεων, ὅσαι ἡμῖν περὶ τῶν θείων ὑπὸ τῶν ἁγίων ἀνδρῶν ἀπεφάνθησαν, ἀρχὴ καὶ ἀξίωμα (11). Barlaam réitère sa fidélité absolue et aveugle aux Pères chaque fois qu'il veut se défendre contre les critiques de Palamas: τὰς τῶν λογίων ἀποφάνσεις, ὅπερ ποτ' ἔχουσιν, ἀποδείξεως πάσης ἀνώτερον τίθημι (12).





Notes

1. «Les débuts de la controverse hésychaste» — Byzantion, Bruxelles, 1954, i.

2. Voir leurs titres dans Fabricius — Harles XI, p. 462 (PG. CLI, 1250 — 1252).

3. Ce sont les No. II, III, IV, V, XVII et XVIII d'après Fabricius. La tradition manuscrite à peu près unanime les groupes en un seul tout (Paris, gr. 1257, 1278, 1308, 2751; Marc. gr. 152 et 153; Mosq. syn. 249 et 251; Vatic, gr. 1106 et mo; Matrit. gr. 4802, etc.). L'auteur lui-même les considère comme une seule «Πραγματεία» (Paris, gr. 1278, fol. 89v).

4. Traités publiés à Constantinople en 1627 (cf. Legrand, Bibliographie hellénique du XVIIe siècle», I, pp. 234 - 237) et considérés à tort par M. Jugie comme datant de la fin de la vie de St Grégoire Palamas («Palamas»— Dict, de Théol. Cath., XI, 2, col. 1743).

5. De proc. S.S. II - PL CLVIII, col. 288 C. Il nous est naturellement impossible d'évoquer ici le problème dans son ensemble. Nous renvoyons donc le lecteur aux ouvrages qui traitent de la question et qui sont assez nombreux. Deux conférences récentes de théologiens catholiques et orthodoxes ont tenté d'examiner le problème, dont ils ont réalisé l'ampleur et l'acuité. Des compte - rendus complets de ces deux conférences ont été publiés par deux revues catholiques: 1) Eastern Churches Quarterly VII (1948) — Supplement issue. 2) «Russie et Chrétienté», 1950, No 3-4. Les débats ont montré que les tentatives de concilier les deux doctrines comme celle de I. Chevalier («St Augustin et la pensée grecque. Les relations trinitaires» Fribourg— en—Suisse, 1940) n'ont pas amené à un résultat satisfaisant.

6. S. Guichardan, « Le problème de la simplicité divine en Orient et en Occident aux XIVe et XVe siècles», Lyon 1933. p. 64 ; Tatakis « Histoire de la philosophie byzantine», Paris, 1949, p. 230, etc.

7. L'ouvrage de Nil a été en partie publié par E. Caudal «Nilus Cabasilas et theologia S. Thomae de processione Spiritus Sancti> Studi e testi, 116 — Città del Vaticano, 1945. Nous avons relevé un grand nombre de parallélismes entre cette oeuvre et les traités inédits de Barlaam : voir notamment le titre de l'introduction de Nil — "Ὅτι ἀδύνατον ἐστι Λατίνοις συλλογισμοῖς χρωμένοις ἀποδεῖξαι ὅτι οὐ μόνος ὁ Πατήρ ἀρχὴ θεότητας, qui est également celui du traité XVII de Barlaam. Le parallélisme entre les deux auteurs a déjà été remarqué par Béssarion de Nicée, d'après lequel Barlaam aurait fourni à Nil des arguments scottistes contre la théologie thomiste (PG CLXI, col. I93 D - 196 A).

8. Syropoulos— Historia vera unionis non verae — éd. Creyghton, Hagae - Comitis. 1660, III, 7, 50.

9. Αἱ τῶν Πατέρων ἀναπόδεικτοι φράσεις τὸ κῦρος κατὰ πάντων ἐχέτωσαν. Paris gr. 1278, fol. 165v.

10. Ibid., fol. 32V.

11. Première réponse à Palamas — éd. Schiro, ASCL, 1936, I - II, p. 88.

12. 2e réponse à Palamas (Marc. gr. 332, Fol. 128v — cf. fol. 133v, 136). Dans ses «Λύσεις εἰς τὰς ἐπενεχθείσας αὐτῷ ἀπορίας παρὰ τοῦ σοφωτάτου Γεωργίου του Λαπίθου (Inc.—Ἐν τοῖς πρώτοις περί...), une oeuvre inédite se trouvant dans le Vatic, gr. ino, fol. 8o-g4v, il affirme que les données de la révélation τὸν ἀνθρώπινον νοῦν ὑποκεῖσθαι ἀναγκάζει, ὥστε οὐδεμία ἀνάγκη τὰ ὑπὸ Θεοῦ γιγνόμενα ἤ περὶ Θεοῦ λεγόμενα ὡς συμφωνοῦντα ταῖς κοιναῖς ἐννοίαις ζητεῖν (fol. 93).

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